Un peu de lecture sur l’expansion coloniale française et l’armée coloniale sous la IIIe République.

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Message  gavach Ven 24 Avr 2020 - 19:24

Voici une synthèse, élaborée à partir de divers documents anciens, qui dormait depuis longtemps dans les fichiers de mon ordinateur.

Le sujet étant assez long, je vais le découper en trois parties successives. Chaque partie fera l’objet d’un message distinct, afin de ne pas saturer le post.

I - Le contexte : l’expansion coloniale française pendant la IIIe République.
II - L’armée coloniale française sous la IIIe République.
III - Méthodes et dérives de la guerre coloniale.

Bonne lecture à tous.

I - Le contexte : l’expansion coloniale française pendant la IIIe République.

L’histoire coloniale française remonte à l’Ancien Régime, avec les comptoirs en Afrique liés à la traite négrière, les îles des Caraïbes et les possessions d’Amérique du Nord. Au XIXe siècle, cet empire commence par reculer, avec la vente de la Louisiane en 1803 et l’indépendance de Saint-Domingue en 1804, avant de regagner du terrain avec la conquête de l’Algérie à partir de 1830.

La France met aussi la main sur de nouveaux territoires en Indochine, Polynésie, Nouvelle Calédonie, mais surtout en Afrique subsaharienne, où un début d’expansion est lancé vers le Sénégal, les côtes de la Guinée et le Gabon.

Après la défaite de 1870, la France marquée par la perte de l’Alsace-Lorraine veut redorer son blason en menant sa "mission civilisatrice" en Afrique et en Asie. Au même moment, le Royaume-Uni brille par son empire immense. Comme les Britanniques, les Français vont chercher leur grandeur dans l’expansion territoriale.

Un peu de lecture sur l’expansion coloniale française et l’armée coloniale sous la IIIe République. 0110

Dans l’esprit de l’époque, la conquête ne se résume pas à une mainmise sur les terres : elle vise aussi les peuples. Il s’agit d’apporter à ces régions lointaines les bienfaits de la civilisation moderne, du progrès technique et de l’humanisme. Cette colonisation ne s’assume pas comme une entreprise de domination, mais comme une œuvre de progrès.

Bien entendu, cette "colonisation bienfaitrice" cache des intérêts économiques. L’expansion coloniale, c’est la promesse d’immenses réserves de matières premières (caoutchouc, bois, minerai), de zones vierges pour les plantations et l’élevage, de nouveaux marchés commerciaux et d’une main d’œuvre plus corvéable qu’en métropole.

A la fin du XIXe siècle, l’Afrique noire devient le terrain privilégié de ce nouveau colonialisme. L’essentiel de cette zone immense est encore vierge de toute présence occidentale. Pendant des siècles, les européens se sont cantonnés aux côtes, où des intermédiaires locaux les approvisionnaient en esclaves et en produits exotiques. Désormais, il s’agit d’une prise de contrôle des terres et des ressources du continent africain. Il faut planter le drapeau tricolore le plus loin possible, avant que les autres puissances européennes n’y parviennent.

Sur le terrain, la conquête se fait de façon désordonnée. Chacun progresse au péril de sa vie à travers d’immenses territoires inconnus. Des aventuriers cherchent à obtenir une terre pour eux-mêmes, les missions financées par des compagnies privées partent en quête de matières premières, les expéditions de l’armée permettent de dessiner une cartographie plus précise de l’Afrique et de délimiter les frontières des territoires conquis.

La plupart des explorations se font dans des zones sans pouvoir centralisé et l’opposition se limite à l’échelle de villages. Quelques actes de violence, pour l’exemple, suffisent pour soumettre ces peuplades. Mais on peut aussi se heurter à des royaumes indigènes organisés et dotés d’un système de défense. Alors, la conquête se fait dans l’affrontement.

Dans les années 1880, la course aux territoires s’accélère et les puissances européennes finissent par se partager l’Afrique.

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L’Afrique Occidentale Française (A.O.F.) :

L'Afrique Occidentale Française (A.O.F.) est créée le 16 juin 1895 par l'union de quatre colonies françaises : le Sénégal, le Soudan français (Mali), la Guinée française et la Côte d'Ivoire.

L' A.O.F. est placée sous l'autorité d'un gouverneur général dont dépendent plusieurs lieutenants gouverneurs. Le gouverneur général, qui est aussi gouverneur du Sénégal, réside à Saint Louis.

En 1902, Dakar devient la capitale du Sénégal. Les postes de gouverneur du Sénégal et de gouverneur général de l’ A.O.F. sont dissociés, la charge initiale étant trop lourde pour un seul homme. L’A.O.F. comprend quatre colonies administrées par un gouverneur (Sénégal, Guinée, Côte d’Ivoire et Dahomey) et un territoire administré directement par le gouverneur général (Haut Sénégal et Niger).

A partir de 1904, l’A.O.F. comprend cinq colonies administrées par un gouverneur (Sénégal, Haut Sénégal et Niger, Guinée française,  Côte d'Ivoire et Dahomey) et un territoire administré par un commissaire du gouverneur général (Mauritanie).

Le décret du 1er mars 1919, portant division du Haut Sénégal et Niger, crée la colonie de la Haute Volta. Le décret du 5 septembre 1932 supprime la colonie de Haute Volta et répartit son territoire entre les colonies du Niger, du Soudan français et de la Côte d'Ivoire.

L’Afrique Equatoriale Française (A.E.F.) :

Jusqu'en 1883, les colonies françaises d'Afrique Equatoriale sont placées sous l'autorité d'un commandant militaire. En 1886, un décret institue deux territoires : le Congo français et l’Oubangui, administrés chacun par un lieutenant-gouverneur. En 1900, le Tchad devient un territoire militaire français, avant d'être réuni à la colonie d’Oubangui-Chari. Le Tchad ne devient une colonie à part entière qu’en 1920.

L'Afrique Equatoriale Française (A.E.F.) est créée le 15 janvier 1910 par l’union de trois colonies (Gabon, Congo, Oubangui-Chari) et d’un territoire militaire (Tchad). Les quatre territoires confiés à des gouverneurs sont regroupés sous l'autorité du gouverneur général, qui réside à Brazzaville (Congo).

En 1919, l'ancienne colonie allemande du Cameroun est placée sous protectorat français. Parfois assimilée à l'Afrique Équatoriale Française, elle possède en fait un statut spécial (commissariat autonome) qui la distingue des colonies de l’A.E.F.

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L’Indochine française :

Créée en 1887, l’Indochine française se compose de plusieurs territoires aux statuts différents : la Cochinchine, l’Annam, le Tonkin, le Cambodge et le Laos. Sur le plan géographique, ces territoires correspondent actuellement au Vietnam, au Laos et au Cambodge.

La colonisation française commence en 1858 avec l’invasion de la Cochinchine (officiellement annexée en 1862) suivie de l'instauration d'un protectorat sur le Cambodge en 1863. Elle reprend à partir de 1883 avec l’expédition du Tonkin, qui conduit la même année à l'instauration de deux protectorats distincts sur l’Annam et le Tonkin. En 1899, le protectorat laotien, instauré six ans auparavant, est rattaché à l’Indochine française.

L’Indochine est le territoire le plus riche et le plus peuplé de l’empire colonial français, mais les français y sont peu nombreux. Il ne s’agit pas une colonie de peuplement mais d’une zone d'exploitation économique, grâce à ses nombreuses matières premières (hévéa, minerai, riz…).
La colonisation française en Indochine est un succès : la balance commerciale y est bénéficiaire et son économie est florissante, ce qui lui vaut le surnom de "perle de l'empire".

Mais tout au long de l'histoire de l'Indochine française, l'ordre colonial fait face à des soulèvements périodiques de la population indigène.

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Le Code de l’indigénat :

Le "Code de l'indigénat" est une réglementation réservée aux indigènes des colonies françaises, dont le but est de faire régner le "bon ordre colonial".

Les premières mesures spéciales sont mises en place en Algérie en 1834, quatre ans après le débarquement des troupes françaises. Le commandement militaire et le gouverneur général se voient attribuer des pouvoirs de "haute police" : ils peuvent désormais prononcer des internements, amendes, travaux forcés ou séquestres comme bon leur semble.

Le "régime de l'indigénat" est codifié par la loi du 28 juin 1881. L'indigène est soumis aux lois pénales françaises, mais il peut aussi être puni d'une amende, d'une peine de prison, de travaux forcés ou de la réquisition de ses biens sans passer par la case justice. Les sanctions collectives sont également possibles : un village entier peut être sanctionné, lorsque le responsable de l’infraction n’est pas identifié.

Dans la liste des infractions spéciales, on trouve l’interdiction de se rassembler à plus de 25 personnes de sexe masculin, l’interdiction de quitter la commune sans permis de voyage, l’obligation d'accomplir des travaux ou des corvées, l’interdiction de propos offensants envers un agent de l’autorité (même en dehors de ses fonctions), la réquisition d’animaux, la confiscation des terres…

Bien que le code de l’indigénat ne prévoit pas de sévices corporels, brimades ou humiliations, les dérives des colons sont nombreuses et se font en toute impunité.

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A partir de 1881, le code de l'indigénat est peu à peu adopté dans toutes les colonies françaises. En Cochinchine, en Afrique, en Nouvelle Calédonie, à Madagascar… Le Togo, ancienne colonie allemande récupérée par les Français après la Première Guerre Mondiale, est le dernier pays à le mettre place en 1923.

Le régime de l’indigénat est démantelé à la fin de la Seconde Guerre Mondiale, par l’Ordonnance du 7 mars 1944, mais certaines pratiques perdurent jusqu’aux indépendances.
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Message  gavach Ven 24 Avr 2020 - 19:31

La suite…

II - L’armée coloniale française sous la IIIe République.

A la fin du XIXe siècle, l’armée française est composée de trois ensembles aux fonctions distinctes : l’armée métropolitaine, l’armée d’Afrique du Nord (appelée "armée d’Afrique") et l'armée coloniale (dite "la Coloniale").

L’armée métropolitaine, composée de conscrits encadrés par du personnel de carrière, est en charge de la défense du territoire national. L’armée d’Afrique est liée à la conquête de l’Algérie, puis de la Tunisie et du Maroc. La Coloniale s’occupe de la conquête et de la pacification des autres colonies.

Il ne faut pas confondre "l'armée d’Afrique" et la "Coloniale". Liée à la conquête de l'Algérie, l’armée d’Afrique n’est pas institutionnellement distincte de l’armée métropolitaine (contrairement à la Coloniale). L’armée d’Afrique comprend des régiments de zouaves (infanterie), de chasseurs (cavalerie), de méharistes (montés sur dromadaires), la légion étrangère et des compagnies disciplinaires (à vocation punitive).

Avant 1900, on ne parle pas encore "d’armée coloniale", mais de "troupes de marine". Leur création remonte à la première phase de conquêtes sous Louis XIV, pour sécuriser les navires, les ports et les comptoirs coloniaux. Leurs surnoms de "marsouins" (pour l’infanterie) et "bigors" (pour l’artillerie) remontent à cette période.

Pourquoi une armée coloniale ?

Au début, la création d’une véritable armée coloniale n’est pas envisagée. On utilise ce qu’on a : les troupes de marine, que l’on renforce avec la légion étrangère. Lors de la guerre de 1870, la "Division Bleue" réunit l’infanterie et l’artillerie de marine (les "marsouins" et les "bigors"). Après la guerre, ces unités participent à la conquête coloniale.

La nécessité de créer une armée spécifique s’impose avec l’expansion coloniale. La France a besoin de troupes capables de s’adapter aux exigences du service dans les colonies, de supporter les fatigues qui leur sont imposées et de lutter contre des bandes indigènes dans la brousse ou les forêts tropicales.

Il y a un point sur lequel tout le monde est d’accord : il ne faut pas contraindre les soldats métropolitains à servir dans les colonies. En effet, s’il semble naturel d’imposer à tous les citoyens valides de défendre la nation en cas de guerre, il est excessif d’obliger un certain nombre d’entre eux à accomplir leur service en temps de paix dans des territoires lointains, dont le climat est réputé malsain pour les européens.

L’armée coloniale n’est pas une armée de conscrits. Elle est recrutée par le biais d’engagements et de rengagements volontaires, encouragés par des primes et des hautes soldes. C’est dans cet esprit qu’est adoptée la loi du 30 juillet 1893.

L’armée coloniale doit avoir une autonomie complète, posséder ses moyens d’action et ses magasins (indépendants de ceux de l’armée métropolitaine). Les hommes de troupes et officiers doivent présenter les aptitudes physiques requises pour servir dans les colonies. Les effectifs doivent être suffisants pour constituer la garnison normale dans les colonies et organiser, en cas de besoin, un corps d’armée expéditionnaire.

Un peu de lecture sur l’expansion coloniale française et l’armée coloniale sous la IIIe République. 06_pet10

Administration de l’armée coloniale :

Jusqu’en 1900, on ne parle pas officiellement d’armée coloniale. Il s’agit de troupes de marine, sous l’autorité du Ministère de la Marine. Mais dès 1883, le sujet est discuté : à quel ministère faut-il confier l’administration des troupes coloniales ? Au Ministère de la Guerre ou à celui de la Marine ?

En réalité, aucun ministère ne veut s’en occuper… Depuis plusieurs années, le ministre de la Marine, absorbé par les soins que réclame la flotte, ne porte qu’un faible intérêt aux troupes servant dans les colonies. Il souhaite les céder au ministre de la Guerre. Et le ministre de la Guerre ne veut pas de cette responsabilité, trouvant sa tâche déjà suffisamment compliquée. Alors, le ministre de la Marine se résigne et garde l’armée coloniale en soupirant…

En 1894, la création du Ministère des Colonies complique encore la situation : il est décidé que le Ministère des Colonies a autorité sur les troupes stationnées dans les colonies. Concrètement, le Ministère des Colonies demande au Ministère de la Marine de lui fournir les troupes nécessaires à la défense des colonies. Mais dès que ces troupes mettent le pied dans les territoires outremer, le Ministère des Colonies en a la charge. Il les répartit dans les territoires, les administre, les paye, les nourrit, les loge et les soigne en cas de maladie.

Le Ministère de la Marine s’implique peu dans le transport des troupes vers les colonies. En effet, le transport maritime de ces troupes se fait plus souvent par les paquebots des diverses compagnies de navigation que par les bâtiments de l’Etat.

Un peu de lecture sur l’expansion coloniale française et l’armée coloniale sous la IIIe République. 0710

Il faut attendre la loi du 7 juillet 1900 pour clarifier la situation : au terme d’un des plus longs débats parlementaires de la IIIe République, cette loi transforme les "troupes de marine" en "armée coloniale", rattachée au Ministère de la Guerre mais disposant d'un régime spécifique et d'un budget distinct.

Pourquoi cette loi instaure t’elle un régime spécifique pour l’armée coloniale, au sein du Ministère de la Guerre ? Pour éviter que l’armée coloniale ne devienne une simple annexe de l’armée de terre. L’armée coloniale doit conserver son indépendance vis à vis des autres rouages du ministère.

Organisation de l’armée coloniale :

L’armée coloniale est une armée de métier : elle est constituée de soldats décidés à faire une carrière militaire et à atteindre, par des rengagements successifs, l’âge de la retraite.

Une armée de métier n’est bonne que si elle est soumise à un entraînement incessant. Des troupes condamnées à l’oisiveté s’engourdiraient dans les casernes et se transformeraient en "piliers de cantine". Avec les troupes coloniales, ce danger n’est pas à redouter : elles sont sans cesse en mouvement, fréquemment détachées dans de petits postes isolés, en contact permanent avec des indigènes dont il est prudent de se méfier, et toujours prêtes à partir pour une expédition.

Concernant le recrutement, l’armée coloniale fonctionne selon le principe de l’engagement et du rengagement volontaire. La solde est plus élevée, favorisant ainsi les vocations.

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En 1898, la durée de l’engagement dans les troupes coloniales est de trois ans. Pour les rengagements des hommes de troupe (d’une durée de deux, trois ou cinq ans), une prime de 200 à 600 francs est donnée (selon la durée du rengagement), ainsi qu’une gratification annuelle de 100 à 160 francs.

Pour les sous-officiers, on fait plus encore : en se rengageant, ils touchent une première prime variant de 480 à 1200 francs, une gratification annuelle de 250 francs, ainsi qu’une prime de 600 à 2000 francs qui leur est payée au moment où ils quittent les drapeaux. En outre, la loi de 1893 leur offre des concessions de terres en Algérie et aux colonies, aux mêmes conditions que celles faites aux autres colons.

A leurs débuts, l’infanterie et l’artillerie de marine sont peu recherchées par les officiers et les candidats ne se bousculent pas. Les emplois de sous-lieutenant de l’armée coloniale sont dévolus aux élèves des écoles militaires classés les derniers sur les listes de sortie, qui les acceptent faute de mieux. Il convient de rappeler que les garnisons des colonies sont plus éloignées que les autres et le risque d’y gagner la fièvre jaune est élevé. Les troupes coloniales sont méprisées par les officiers métropolitains. Elles n’attirent que des officiers en mal d’exotisme, souhaitant échapper à la monotonie des casernes.

Mais leur commandement devient de plus en plus convoité : en temps de paix, c’est l’occasion d’exploits permettant de se distinguer plus rapidement qu’en métropole. Les campagnes coloniales ont la réputation d'aguerrir les chefs et surtout, à partir de 1880, elles offrent l'avantage d'une solde majorée et d'un déroulement de carrière accéléré. Les recrues de l’armée coloniale occupent désormais, sur les listes de sortie des écoles militaires, des rangs très honorables.

A propos du statut particulier des officiers de l’armée coloniale, le Colonel Corbin écrit en 1898 :
"Avec de tels avantages, l’officier qui consent à servir son pays loin de la France et des siens supporte mieux les contraintes de son métier. Il reste des années sans voir ses proches. S’il est marié, il affronte plus facilement la tristesse de la séparation prolongée et de l’irrégularité du courrier.
L’officier colonial n’est-il pas digne de ces avantages exceptionnels ? Il reste des mois dans un poste perdu à des centaines de kilomètres de tout centre habité. Il est exposé à une température torride, privé de tout confort, environné de dangers qui l’obligent à veiller jour et nuit.
Et pourtant, cette vie sévère possède des charmes étranges et une grandeur captivante. A la pensée qu’il fait respecter le drapeau français sur ce territoire lointain, se joint cette autre pensée réconfortante qu’il est autre chose qu’un de ces vulgaires rouages militaires faits pour recevoir et transmettre des ordres. Il connaît l’ivresse du commandement indépendant et le sentiment troublant de la responsabilité".

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Même si l’armée coloniale est autonome, il reste possible aux officiers dont la santé n’a pu s’adapter au climat équatorial de passer dans l’armée métropolitaine. De même, les officiers métropolitains tentés par une vie d’aventure peuvent intégrer l’armée coloniale.

L’Armée coloniale se décompose comme suit :
- Les Marsouins et Bigors : c’est l’infanterie et l’artillerie coloniale "blanche", composées d'engagés métropolitains. Ils représentent environ la moitié des troupes coloniales.
- Les Tirailleurs : ce sont les hommes recrutés dans les colonies et placés sous le commandement d'officiers français. Les unités de tirailleurs sénégalais regroupent les hommes recrutés en Afrique noire, qu'ils soient sénégalais, soudanais, guinéens, ivoiriens, dahoméens, mauritaniens ou nigériens. Il y a aussi des régiments de tirailleurs malgaches et indochinois. Ils viennent compenser le manque de troupes métropolitaines.

L'utilisation de nombreuses troupes supplétives, constituées des colonisés eux-mêmes, est l’une des caractéristiques majeures de l’armée coloniale. Le développement des régiments "indigènes" est simultané à la conquête : pour réduire le coût des expéditions, on autorise le recrutement local. La colonisation coûte finalement peu de vies françaises.

Implantation géographique des troupes coloniales :

Concernant l’implantation géographique, l’effectif militaire varie en fonction de l’étendue de chaque colonie, et selon que la pacification est plus ou moins complète. A titre d’exemple, pour l’année 1898, la répartition géographique de l’armée coloniale est la suivante :

- Concernant les troupes d’infanterie et d’artillerie coloniale, composées d’éléments exclusivement français : Un régiment en Cochinchine. Deux régiments en Annam et au Tonkin. Un régiment en Nouvelle Calédonie. Un régiment à Madagascar. Ces cinq régiments sont à trois bataillons de quatre compagnies chacun, sauf celui de la Nouvelle Calédonie qui ne compte que deux bataillons à trois compagnies. Il y a en outre un bataillon de trois compagnies à la Martinique, un autre de composition identique à la Réunion, un bataillon à quatre compagnies en Guyane et un autre pareil au Sénégal, ainsi qu’une compagnie en Guadeloupe et une à Tahiti. Ces troupes sont renforcées par cinq bataillons à quatre compagnies de la légion étrangère (4 en Annam et au Tonkin et 1 en Cochinchine) et trois compagnies de discipline (une en Martinique, une au Sénégal et une autre à Madagascar). Ces diverses troupes forment un total de 89 compagnies, donnant un effectif de 15419 hommes, dont 3085 appartenant à la légion.

- Concernant les troupes recrutées localement : Un régiment en Cochinchine. Trois régiments de tirailleurs tonkinois pour l’Annam et le Tonkin . Un régiment de tirailleurs sénégalais au Sénégal et un bataillon de ces mêmes tirailleurs au Congo. Au Soudan français (Mali), un régiment de tirailleurs soudanais. A Madagascar, un régiment de tirailleurs malgaches. Une compagnie suffit à garder le Dahomey. Tous les cadres de ces régiments sont français, à l’exception de 8 sergents, 18 caporaux, 1 caporal fourrier et 2 clairons par compagnie, qui sont indigènes. Ces différents corps représentent un total de 119 compagnies, dont l’effectif est de 27604 hommes. Cet effectif se décompose en 2257 cadres français (dont 450 officiers) et 25347 indigènes.

- A ces troupes stationnées dans les colonies s’ajoutent des régiments résidant en France. Ils sont chargés de fournir, au fur et à mesure des besoins, le personnel nécessaire. Pour opérer cette relève, on compte huit régiments qui tiennent garnison dans les ports français. Ils ont chacun quatre bataillons de quatre compagnies, soit un effectif total de 13234 hommes.

Missions de l’armée coloniale :

L’armée coloniale doit satisfaire à une double mission. D’une part, elle est chargée de la garde et la défense des colonies, en assurant leur tranquillité intérieure et en les protégeant contre le brigandage ou les attaques de tribus insoumises. D’autre part, elle fournit les forces nécessaires à la constitution d’un corps d’armée expéditionnaire, si des circonstances l’exigent.

Une fois l’empire colonial consolidé, la tâche de l’armée coloniale n’est pas terminée. Elle a également pour mission de défendre les frontières et les ports des colonies contre la jalousie des autres nations européennes ou l’agressivité des peuples indigènes voisins, tentés de faire des incursions sur nos territoires.

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Message  gavach Ven 24 Avr 2020 - 19:37

III - Méthodes et dérives de la guerre coloniale.

Forts de leur expérience acquise lors de la conquête de l'Algérie, les militaires justifient l'existence d'une armée spécifique aux colonies par la nature particulière des méthodes utilisées. L'éloignement prolongé des soldats hors de la métropole permet de maintenir une relative discrétion sur la violence des techniques de conquête et de pacification.

Les guerres coloniales favorisent l’exercice d’une violence militaire obéissant à d’autres règles que lors des guerres entre européens : c’est une violence dirigée contre les populations civiles, et non simplement contre les forces armées adverses.

Au sein même des troupes coloniales, l'utilisation des tirailleurs est marquée par la discrimination. Leur emploi comme troupes d'assaut est justifié par leur prétendue incapacité à ressentir la peur par anticipation, en raison d’un "système nerveux peu développé" (Faidherbe). Leur instruction est sommaire, fondée uniquement sur l'exemple ("tu fais comme ça"). Leur avancement est souvent bloqué ou ralenti. A grade équivalent, c'est le militaire français qui conserve le commandement.

En dépit des discriminations, les phénomènes de révolte ou de désertion sont peu nombreux. Le statut de soldat assure une obéissance totale, encore renforcée par les pillages autorisés, voire encouragés.

Elaboration des méthodes :

Les méthodes utilisées par l’armée coloniale sont directement inspirées de celles de l’armée d’Afrique lors de la conquête de l’Algérie.

Pour rappel, le général Clauzel mène en novembre 1830 le premier massacre collectif à Blida. Le général Savary, nommé en 1832, fait procéder au massacre de la totalité de la tribu des Ouffas, en représailles d'un vol, en ordonnant à ses troupes : "Des têtes ! Apportez des têtes !". Clauzel, devenu maréchal, revient en Algérie et organise le massacre de prisonniers et de civils, menant selon ses propres termes "une guerre d'extermination".

Jusqu'ici limitée, la guerre devient totale. On efface la distinction entre cibles militaires et populations civiles. Face à un ennemi qui utilise les techniques de harcèlement et de guérilla, les officiers français rappellent à leurs troupes qu’il faut oublier les règles apprises en métropole, car il ne s'agit pas d’une guerre "contre une armée ennemie, mais contre un peuple ennemi". Tout comme les chefs de l’armée d’Afrique, ceux de la "Coloniale" mettront en place de petites unités très mobiles, relativement autonomes, jouant sur l'effet de surprise et sur le choc psychologique à produire.

Un peu de lecture sur l’expansion coloniale française et l’armée coloniale sous la IIIe République. 1110

On terrorise et on frappe la population dans son ensemble, pour le soutien qu'elle est susceptible d'apporter aux bandes insoumises et pour l’obstacle qu’elle constitue à l'implantation des colons sur les meilleures terres.

Pour décourager les résistances, on développe la pratique de la razzia. Il ne s'agit pas seulement de pillages traditionnels obéissant à une logique de prédation ni uniquement d'offrir aux soldats une récompense après la bataille. Il s’agit d’une véritable stratégie délibérée, où tous les territoires et leurs ressources deviennent des objectifs militaires, de manière à obtenir la fuite ou la reddition des tribus insoumises.

Un peu de lecture sur l’expansion coloniale française et l’armée coloniale sous la IIIe République. 1210

La méthode de la razzia est ainsi décrite par le lieutenant-colonel de Montagnac : "Toutes les populations qui n'acceptent pas nos conditions doivent être rasées. Tout doit être pris, saccagé, sans distinction d'âge ni de sexe... On ravage et on pille". Les pratiques utilisées pendant les razzias visent à répandre la terreur : mutilations, décapitations, trophées humains, chapelets d’oreilles, viols, meurtres d’enfants. Certaines obéissent à des procédures précises et sont organisées par la hiérarchie militaire.
                                               
Perfectionnement des stratégies :

La conquête de l'Afrique noire et de l’Asie permet à l'armée coloniale de poursuivre et développer les méthodes initiées en Algérie. En Afrique noire, à Madagascar ou en Indochine, des colonnes pillent, massacrent et détruisent villages et troupeaux des populations qui résistent. Les prisonniers sont exécutés. On utilise encore la méthode des razzias, dans le cadre d'expéditions punitives. On continue de pratiquer les décapitations, pour attester que l'on n'a pas gaspillé en vain ses munitions.

Un peu de lecture sur l’expansion coloniale française et l’armée coloniale sous la IIIe République. 1310

Faidherbe applique au Sénégal les techniques de contre-guérilla qu'il a pratiquées en Algérie. De 1892 à 1896, Gallieni exporte au Tonkin, puis à Madagascar, les méthodes qu’il a apprises en Afrique noire et qui lui valent le surnom de "général cruel".

On peut citer le cas de la colonne Voulet : la barbarie dont elle fait preuve est révélatrice des méthodes utilisées. En 1898, lors d’une expédition française au Niger, elle brûle 50 villages et reçoit le triste surnom de "Chop-Chop" pour sa promptitude à manier la machette contre les Africains.

Il faut toutefois mentionner que la violence coloniale n'est pas spécifique à l'armée française. Au Congo belge, les troupes du roi Léopold pratiquent une boucherie sans nom. En 1904, la révolte de la Namibie donne l’occasion à l’armée allemande de pratiquer le premier génocide du XXe siècle.

Cependant, l’extermination totale des peuplades colonisées n’est pas le moteur de l’entreprise coloniale. Simplement, tant que la main d’œuvre est abondante, elle peut être gaspillée. Quand elle devient plus rare, il devient nécessaire de l’économiser. Les colonisés constituent une réserve de travailleurs forcés, de contribuables et de soldats.

Progressivement, les officiers coloniaux développent une stratégie selon laquelle on n’attend plus la fin des opérations militaires pour prendre en charge les populations. L’administration commence à se déployer pendant la phase de conquête militaire. Les régions administrées constituent alors des points d'appui successifs, pour parvenir à la conquête militaire de la totalité du territoire.

Sexualité coloniale :

Au chapitre des pratiques militaires coloniales, il faut aborder les questions relatives à la sexualité. On a déjà évoqué la question des viols, qui étaient un instrument de terreur pendant la conquête, mais aussi un moyen de récompenser les soldats.
 
La prostitution est également encouragée par la colonisation. Les autorités militaires favorisent le développement des bordels militaires de campagnes (BMC) ou de bordels attachés aux villes de garnison, alimentés parfois par les filles de notables locaux récalcitrants. Les prostituées peuvent être réquisitionnées à partir de l'âge de douze ans. Il s'agit de satisfaire les "besoins" des militaires tout en limitant le développement des maladies vénériennes. Les BMC sont ainsi légalisés en A.O.F. par un décret de 1909 et assujettis à l'obligation de contrôle médical. Ils sont considérés comme d'utilité publique et rattachés aux unités. Une réglementation précise leur organisation, sous le double contrôle du commandement et du service de santé des armées. Le rythme de fréquentation et la tarification sont arrêtés par le chef de corps.

Mais les bordels militaires de campagne sont moins répandus dans la Coloniale que dans l’armée d’Afrique, en raison d’une autre pratique connue sous l’appellation de "mariage à la mode du pays", qui consiste à prendre une compagne "indigène" le temps du séjour aux colonies. Les officiers qui n’en profitent pas sont jugés excentriques par leurs pairs. Il s’agit d’un concubinage inégalitaire, permettant de changer de compagne à volonté mais n'assurant aucun droit à cette dernière, celle-ci étant abandonnée au moment du retour en métropole. En Indochine, une concubine indigène est appelée une "congaï".

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Message  steiff60 Ven 24 Avr 2020 - 20:45

post honnête , et bien construit, une réalité mais qui actuellement peut valider la chose ? dans notre monde de bisounours!

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Message  gavach Ven 24 Avr 2020 - 21:05

L'objectif de ce post n'est pas de valider ou légitimer quoi que ce soit, mais simplement de faire un petit "rappel historique".
D'ailleurs, pour respecter l'esprit et la pensée de l'époque, j'ai volontairement conservé certains termes utilisés dans les documents anciens qui ont servi de base au sujet.

Si certains d'entre vous souhaitent ajouter au post des informations, liens, documents ou photos d'époque, cela me permettrait de compléter ma documentation sur le sujet.

salut
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Message  Invité Ven 24 Avr 2020 - 21:29

merci pour le partage !

L ´utilisation massive en première ligne des troupes indigènes est un mythe, il suffit de se pencher sur les statistiques de pertes (standardisées au cours du 1er conflit mondial) pour s en rendre compte. Quand à l instruction au combat, et l instruction globale des tirailleurs elle est poussée et plus longue que celle des européens puisqu’il est communément admis qu il faut 6 mois à un indigène pour assimiler ce qu un européen acquiert en 3 mois. Des manuels en « langage de tirailleur » ou « français tiraillou » mélange de francais et de dialecte local sont même développés, avec leurs propres règles de grammaire, et le vocabulaire lié à l instruction y est essentiel 
Quiconque a accompagné au combat ou encadré une troupe étrangère sait qu il est suicidaire de faire l impasse sur l instruction.
Ce constat sera régulièrement effectué jusqu'à à peu près la moitié de la guerre d ‘Indochine dans les unités de tirailleurs.
De même tirailleurs et gradés indigènes et cadres métropolitains vivent les mêmes vicissitudes et les mêmes tourments. Au combat le tirailleur est commandé par l'exemple de son chef.
Le respect des us et coutumes locaux ne doit pas être passé sous silence et les épouses "madame tirailleur" sont autorisées à suivre leur mari au cantonnement et en campagne (une hiérarchie des épouses se créant et se calquant sur les grades des maris).
L'avancement existe et il est possible aux tirailleurs d’accéder au corps des officiers certes difficilement (cf le célèbre CNE Charles N'Tchorere assassiné par les allemands en 40 en est un exemple)


Quant aux techniques de guerres dites coloniales seuls les aspects coercitifs sont étudiés ici et il n est pas fait mention des stratégies de ralliement s appuyant sur la prise en compte des besoins des populations et des chefs locaux. 
Comment faire l’impasse sur Liautey, ou croire que des régions entières ont été administrées uniquement par la contrainte  avec des effectifs plus que restreints ?
Les ralliements de tribus libérées de l esclavage ou de la menace de tribus ennemies ont eu une importance capitale fournissant aux coloniaux des alliés fidèles. De même la mise au pas des tribus adeptes des razzias a jeté dans les bras des coloniaux les populations autrefois soumises.Enfin le rôle des médecins militaires et des bâtisseurs coloniaux fournisseurs d'infrastructures parfois basiques qui faisaient défaut a permis de pacifier des régions entières en s'appuyant uniquement sur des manœuvres d'influences qui furent "redécouvertes" dans les années 50 et encore étudiées aujourd’hui de par le monde (à West Point notamment)

Encore aujourd’hui ces vieilles alliances ressurgissent sur les théâtres d opérations actuels et compliquent la tâche de ceux qui les ignore (cf tamashek kel Adagh vs Ifora au Nord Mali ou Lat Dior vs Cheikhou Amoudou au Sénégal)

La photo des pirates du Tonkin mérite de souligner que ces "pirates" ou "pavillons noirs" étaient des pillards Chinois parfois utilisé s par les annamites contre les tribus des montagnes mettant à sac les villages et exécutant les habitants. Ces tribus de montagnards étaient ravies de voir leur têtes s'empiler.

Enfin le poids économique des colonies a couté à la métropole plus qu'il ne lui a rapporté, les exemples sont légions et le prix de vin algérien n'en est qu'un avatar

De même ne pas oublier que les habitants d'un certains nombre de ville aux Sénégal par exemple étaient considérés comme Français  (de mémoire Dakar, Saint Louis Gorée et Rufisque de mémoire), avec prise en compte de la polygamie, avec conseillers municipaux et députés.

Cordialement.
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Message  gavach Sam 25 Avr 2020 - 7:59

Merci pour ces précisions, Adishatz.
Comme je l'ai précisé, j'ai essayé de retranscrire les conceptions de l'époque (fin XIXe - début du XXe siècle) et l'esprit des documents que j'ai consulté. Cela ne reflète peut-être pas toute la réalité des situations...

J'ai effectivement pu lire que les engagés "locaux" des régiments de tirailleurs pouvaient accéder au corps des officiers. Mais leur avancement était limité au grade de capitaine (d'après les écrits du Colonel Corbin en 1898).

L'instruction militaire des "indigènes" (pour reprendre le terme utilisé à l'époque) était plus laborieuse que celle des recrues françaises. La barrière de la langue, les différences des "us et coutumes", y était forcément pour beaucoup. C'est la raison pour laquelle les militaires français estimaient que l'instruction des "locaux" était plus sommaire que celle des français. Dans l'esprit de l'époque, on ne pouvait pas se permettre de faire bénéficier ces recrues d'une instruction trop longue, l'objectif étant de les reverser sur le terrain selon un rythme défini par l'armée et sous commandement français.

Concernant les méthodes de guerre coloniale, je n'ai effectivement retranscrit que quelques éléments. S'il fallait en aborder tous les aspects, le post aurait été interminable… Mais d'après ce que j'ai pu lire, l'expansion coloniale s'est également effectuée sur la base de "conventions" passées avec des chefs locaux, au fur et à mesure de l'avancée des troupes coloniales. Le statut de soldat "tirailleur" était beaucoup plus enviable et protecteur que celui d'esclave (au moment de l'arrivée des européens, certaines peuplades d'Afrique réduisaient encore leurs prisonniers à l'esclavage).

Le sujet est plus vaste et plus complexe qu'on ne pourrait le croire...


Dernière édition par gavach le Sam 25 Avr 2020 - 8:09, édité 1 fois
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Message  Invité Sam 25 Avr 2020 - 8:09

Merci pour cet échange.
En effet, comme je tenais à le faire remarquer l’expansion s est massivement appuyée sur des ralliements et des accords locaux et les exactions décrites plus haut, pour regrettable qu ' elles fussent n ont pas constitué la norme loin de la, contrairement à ce que l on voudrait nous faire croire de nos jours
Car  les Français en débarquant ont interdit l'esclavagisme et réprimé les tribus esclavagistes se faisant ainsi des alliés parmi les chefferies locales.
Les conquérants se sont appuyés sur les connaissances qu' ils acquieraient de ces populations et sur les antagonismes locaux pour recruter et surtout pour administrer ces régions où les faire administrer.
Qui sait que la première mosquée de Kidal a été construite par les Français  ou que les goum du cercle de Bilma croulaient sur les candidatures de recrutement, les locaux souhaitant combattre avec les Français les razzieurs d'oasis venu du nord ?
Le rôle de bâtisseur des coloniaux et les médecins ont également fait beaucoup.

Les gestion ou plutôt l'absence de gestion de certain de ces territoires et notamment les plus sous administrés comme l'Oubangui Chari livré aux sociétés concessionnaires privées faute d'administration coloniale et les abus tels que les travaux forcés sont une autre histoire

Pour citer la chanson (l'une des différentes version):
Nous sommes fier d'avoir été
les pionniers d'un Empire
Et si nous sommes dénigrés
personne n'à a rougir
anciens d'Afrique
venus du Pacifique
nous avons lutté ensemble
Pour un idéal !


Cordialement
Bonne journée


Dernière édition par adishatz le Sam 25 Avr 2020 - 9:33, édité 1 fois (Raison : syntaxe)
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Message  gavach Sam 25 Avr 2020 - 9:28

Oui, en effet. A la fin du XIXe siècle, la méthode d'expansion coloniale privilégiait la signature de "conventions" avec les tribus locales.
Mais si le "ralliement pacifique" était impossible, on basculait dans l'affrontement, comme je l'ai écrit plus haut. La phase de "diplomatie" laissait place à la guerre. Et la violence de l'affrontement armé favorisait parfois la barbarie. Il s'agissait d'instaurer un régime de terreur, ponctuellement mais délibérément organisé, afin d'inciter les peuplades insoumises à capituler rapidement.

Pour ceux qui voudraient approfondir certains aspects du sujet ou s'imprégner de l'esprit de l'époque, j'ajoute ci-dessous les liens vers quelques documents :

- L’armée coloniale, colonel Ch Corbin, 1898 :

https://fr.wikisource.org/wiki/L’Armée_coloniale

- L’amour aux colonies, 1893 (attention : ouvrage controversé dont certains passages peuvent choquer) :

https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k8579911

- L’Afrique sous domination coloniale 1880 - 1935 :

https://unesdoc.unesco.org/ark:/48223/pf0000184322
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Message  LP Sam 25 Avr 2020 - 10:14

Merci pour ce sujet fort intéressant et bien rédigé même s'il est en marge du thème du forum. La conquête coloniale a toujours été dans l'histoire le moteur de l’expansion des peuples dominants, des assyriens à Rome, des incas aux conquistadors, sans oublier les perses, les arabes, les ottomans, les germains, les viking... Les occidentaux n'ont fait que reproduire un schéma séculaire. Et que dire des américains et du sort réservé aux indiens.

Pour revenir peut être au thème du  forum, il serait intéressant de parler des équipements de ces forces, il y a eu des particularités  dont les fusils de tirailleurs indochinois 1902  et le fusil colonial 1907 et peut- être d'autres moins connus?
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Message  Pâtre Sam 25 Avr 2020 - 10:39

salut

Post intéressant, merci du boulot de synthèse!

gavach a écrit:...
L'instruction militaire des "indigènes" (pour reprendre le terme utilisé à l'époque) était plus laborieuse que celle des recrues françaises. La barrière de la langue, les différences des "us et coutumes", y était forcément pour beaucoup....
Je critiquerais ce point.
Si l'instruction couvrait une formation militaire, manœuvre des armes, discipline d'une armée "régulière", mouvement de troupes, etc.
Elle était complétée par une instruction "idéologique" (résumée par exemple dans les symboles "un drapeau, trois couleurs").

Ça ne doit pas faire oublier qu'une bonne partie des recrues étaient souvent déjà des "soldats"! Ou pour le moins des guerriers.
Que si les engagements ont put êtres individuels, ils ont souvent été collectifs. Des vaincus sont devenus des alliés, des troupes adverses se sont ralliées.

gavach a écrit:...
Le sujet est plus vaste et plus complexe qu'on ne pourrait le croire...
Un peu de lecture sur l’expansion coloniale française et l’armée coloniale sous la IIIe République. 671531 
Et si l'on évite les écueils du jugement à posteriori (condamnation comme apologie), ça permet une grille de lecture de l'histoire, passée & à venir.

Un peu de lecture sur l’expansion coloniale française et l’armée coloniale sous la IIIe République. 72113


Dernière édition par Pâtre le Sam 25 Avr 2020 - 10:48, édité 1 fois
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Message  Jeppesen Sam 25 Avr 2020 - 10:45

Merci Gavach,

très intéressant.


Sur le même "sujet", on trouve actuellement un"Spécial HISTOIRE" en librairie, que j'ai acheté il y a 2 jours.

Par encore lu, mais mon épouse qui est "dessus" actuellement me dit que c'est bien.


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Message  gavach Sam 25 Avr 2020 - 12:20

LP a écrit:Pour revenir peut être au thème du  forum, il serait intéressant de parler des équipements de ces forces, il y a eu des particularités  dont les fusils de tirailleurs indochinois 1902  et le fusil colonial 1907 et peut- être d'autres moins connus?
Oui, tu as raison !
Mais étant "ignare" en la matière, je laisse le soin aux spécialistes de développer le sujet (et moi, j'en profiterai pour apprendre).
Je n'ai pas trouvé de document probant sur l'armement ou les uniformes de la "Coloniale".
Je suis encore dans une phase de recherche et de documentation.
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Message  Quentin1873 Sam 25 Avr 2020 - 12:38

Merci beaucoup pour ces informations, pistes de réflexions et de lecture sur les colonies.
Il faut effectivement se plonger dans l'ambiance de l'époque et s'abstenir de juger avec un regard "d'aujourd'hui", ces pratiques.

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Faites un tour sur mon site consacré au revolver Chamelot Delvigne modèle 1873: https://www.revolver1873.fr/
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Message  Pocomas Sam 25 Avr 2020 - 12:52

Merci pour ce partage très intéressant et merci aux intervenants qui nourrissent le sujet. 

A mon niveau je peux juste confirmer que les médecins militaires ont travaillé dans les coins les plus reculés des ces régions avec des moyens dérisoires et ont toutefois contribué à améliorer considérablement les conditions de vie.

De vieux africains m'en ont parlé avec émotion il y a quelques années.

J'en ai connu un qui avait vécu sa jeunesse de médecin dans des conditions guère meilleures que les autochtones.
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Message  gavach Dim 3 Mai 2020 - 10:38

Pour compléter le sujet...

Je me suis demandé quel était le montant des soldes militaires au début du XXe siècle.
Etaient-elles attractives ? Nos militaires gagnaient-ils bien leur vie ?

En guise de repère :
En 1910, le salaire moyen d'une "bonne à tout faire" était de 1,50 francs par jour. Un facteur gagnait 2 francs par jour, tout comme une couturière. Un kilo de pain coutait 40 centimes, un litre de lait 10 centimes, une côtelette de porc 25 centimes...

Je vous laisse comparer avec le tableau des soldes militaires en 1912 :

Un peu de lecture sur l’expansion coloniale française et l’armée coloniale sous la IIIe République. Soldes11
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Message  deGuers Dim 3 Mai 2020 - 10:40

Instructif . salut

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Message  WICHITA Dim 3 Mai 2020 - 14:26

fallait passer les cinq premières années impérativement !

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